Ils sont designers, décorateurs, architectes, directeurs artistiques, ensembliers… Ils ont un talent en commun, créer une atmosphère, développer une ambiance. On reconnaît leur touche que ce soit dans un objet, un meuble, une décoration florale ou la mise en place d’un buffet. Ils ont un je ne sais quoi qui les distingue, les personnalise, et les rend à nul autre pareil. Cela s’appelle le style.
HAJER AZZOUZ : CREATEUR D’ATMOSPHERE
« Peu importe les règles du bon goût puisqu’elles doivent, dans ma demeure, céder à celles de mon goût à moi qui s’accommode très bien de tous ces rapprochements » écrivait Christian Dior dans son autobiographie. Cette phrase, Hajer Azzouz aurait pu se l’approprier tant son goût, et l’aménagement de la Maison de la Plage qui est son univers esthétique, est fait, justement, de ces rapprochements.
Dans cette maison de poupée, ouvrant sur un jardin de curé, l’espace aurait pu sembler limité s’il n’était aussi saturé d’objets, de meubles, de tableaux, de sculptures qui toutes attirent le regard, retiennent l’attention, ouvrent sur des univers différents. Hajer Azzouz, créatrice d’atmosphère comme on aime l’appeler, organise, à la lueur de bougies, un joyeux et chaleureux méli-mélo. Elle convie tous les artistes qu’elle aime, et ceux qu’elle a découvert et dont elle se fait l’agent, à partager également, et sans hiérarchie, ses cimaises, mais aussi ses coins de canapé, ses accumulations de livres, ses dessus de meubles. Feryel Lakhdar, Sabri Ben Mlouka, Othman Taleb, ou Adel Siwi cohabitent avec des marionnettes siciliennes, des anges en plâtre, ou des hippopotames en pierre à savon africains. Des meubles lisses de laque grise qu’elle a conçus, introduisent un moment contemporain, épuré dans ce foisonnement de cabinet de curiosités, et prouvent avec élégance combien tout peut s’harmoniser, design et baroque, ancien et moderne, bronze classique et nacre orientaliste, objets rares ou découvertes de bazar. Ils accueillent des déclinaisons de tissus, des alliages de matières, des choix de camaïeus rappelant que nous sommes dans un atelier de travail, ce que l’atmosphère intimiste, la tarte aux pommes parfumée, et le café fumant avaient pu nous faire oublier.
Entre les tableaux, occupant eux aussi les cimaises, des tissages, des broderies anciennes, un kimono, des panneaux japonisant ouvrent sur un autre univers que Hajer Azzouz a décidé d’explorer.
Elle prépare en effet une collection capsule de textile, le terme englobant aussi bien des vêtements que des coussins, inspirés de différents patrimoines et techniques traditionnelles. C’est pour cela qu’elle se propose de partir en Afrique travailler sur les tissus et les teintures végétales, puis au Japon, dont elle aime les soies, les lignes des kimonos… Plus que sillonner le monde, ce que souhaite Hajer Azzouz, c’est convier l’univers chez elle : en ramener techniques et savoir-faire, et l’offrir aux artisans avec lesquels elle travaille, élargissant ainsi leur champ de possibilités.
Texte : Alya Hamza – photos : Vincenzo Mangani
Article paru dans iddéco n°38 – Janvier 2019