Elle détonne quelque peu dans l’univers arty tel qu’il se déploie de nos jours : Chacha n’en a ni les paillettes, ni l’esbroufe, ni le langage codé, ni même le ton péremptoire qui en est souvent la marque.
Chacha Atallah est discrète, mesurée, rêveuse, subtile. Elle parle doucement, immergée dans son univers esthétique, explique calmement ses arguments et convainc aisément ses interlocuteurs.
Née à Carthage, au bord de la méditerranée, elle a fait ses études d’architecture en France, et a découvert son pays mental au Japon où elle faisait un stage. Elle revient en Tunisie, s’installe face à la mer, et construit des maisons compacte, monolithiques et ouvertes à la fois, dépouillées, des maisons intelligentes qui tiennent compte du climat, de l’environnement, de l’implantation, et de l’architecture vernaculaire depuis laquelle on n’a plus rien inventé.
« Nous travaillons sur des projets des deux côtés de la Méditerranée. Nous développons une architecture proche de notre environnement avec le plus de matériaux locaux possible, avec un travail poussé sur la volumétrie, point essentiel dans les pays de soleil. Chaque projet est pour nous une progression vers une architecture ancrée, inspirée du vernaculaire, produisant un nouveau genre ».
Est-ce son séjour au Japon ? Chacha Atallah ne ressemble à personne dans sa façon d’appréhender les gens et les choses. Elle a découvert que les objets, les meubles, eux aussi, obéissaient aux règles de l’architecture, de l’harmonie, de l’ergonomie. Elle s’est passionnée pour le design qu’elle aborde avec un regard d’architecte.
« Aujourd’hui, je conçois des pièces de mobilier… Un retour aux sources important car c’est ici que j’explore la matière et goûte au temps de façonnage des pièces ».
Elle invente des meubles où le bois et le marbre alternent sans agressivité, crée des formes de vaisselles douces à l’œil et à la main, dessine des objets qui ne répondent pas forcément à une fonctionnalité et qui sont là pour le plaisir.
De l’architecte ou du designer qui est de plus en plus sollicitée puisqu’on l’a vue sélectionnée pour des rencontres à Dubaï, à Londres, à Paris, qui prédomine dans le regard et l’approche de Chacha ?
« Je dirais que je fais du mobilier comme un architecte. J’ai un penchant exacerbé pour le Japon, la sobriété apparente, le souci du détail à chaque instant de la vie. Et, cela peut paraître opposé, j’ai également une fascination pour l’Art Déco. Ce sont deux sources d’inspiration qui, quand on étudie bien le sujet, sont très similaires : la beauté en tout et dans le moindre objet régit le mode de vie ».
Article paru dans iddéco n°31 – Décembre 2017