La maison, dans les tonalités gris et bois, reflète la manière de vivre les intérieurs de sa propriétaire. Elle a conçu sa maison comme un écrin pour les objets qu’elle aime et ceux qu’elle crée. Un havre de paix au reposant mélange de styles et de couleurs.
Samia Mestiri Douik est créatrice d’objets et d’ambiance. Elle crée des objets artisanaux qu’elle place dans un cadre contemporain, comme sa maison qu’elle vient de finir à Gammarth forêt. On a pu en voir des images sur la page fb de « Tunisie autrement ».
C’était le nom de sa boutique qu’elle vient de fermer en vue de rouvrir un nouveau showroom appelé « Ethnizia ». De mère artiste et de père ingénieur et bricoleur, Samia Mestiri Douik a un parcours original en matière de décoration : « Quand j’étais à l’école, je faisais des dessins par passion, des croquis d’objets, les dessins de mes amis ». Son baccalauréat en poche en 1990 elle ne fait pas les Beaux Arts parce que c’était considéré comme une filière « peu sérieuse ». Elle étudiera l’anglais et deviendra traductrice.
Cela ne l’a pas empêché de s’adonner à sa passion, le dessin et la conception des objets. « Tout ce que j’avais dans la maison était de ma conception. » Après treize ans de travail et un deuxième enfant, elle saute le pas et décide de vivre de sa vocation : « C’est beaucoup plus épanouissant. Quand on fait un travail qu’on aime, ça n’a pas de prix. »
Elle commence par faire des tableaux en fleurs séchées. C’est un succès. Elle continue par la conception de tableaux pour enfants. Elle se lance ensuite dans la décoration : « Mon plaisir est de créer un objet qui n’a pas été fait auparavant, à partir de matériaux traditionnels et d’y ajouter une touche contemporaine pour que l’on puisse les intégrer dans un contexte plus ou moins moderne pour les mettre en valeur. »
En 2011, dans le pays en pleine effervescence, elle qui voyait l’artisanat autrement, crée « Tunisie Autrement » et ouvre sous cette appellation un showroom en 2012. Elle a participé à plusieurs salons de décoration à l’international, notamment « Maison et Objet » à Paris et « Tendances »
à Francfort.
Sa nouvelle maison, dans les tonalités gris et bois reflète sa manière de vivre les intérieurs : « Une maison, c’est un sanctuaire, un havre de paix où l’on peut souffler après la course folle de nos vies trépidantes. (…) Un mélange de styles et de couleurs. »
Loin des intérieurs contemporains aux ambiances très épurées, Samia Mestiri Douik en fera un écrin pour les objets qu’elle conçoit et qu’elle aime, qui ont une histoire, les objets africains, asiatiques, indonésiens…
Pour elle, l’accessoire fait le principal. Dans une niche sont disposées des sculptures en rakû d’El Houch à Jerba. La niche a été créée pour les accueillir. Il en est de même avec le panneau qui abrite, dès l’entrée, un grand masque de Côte d’Ivoire. Elle a imaginé sa maison à partir des accessoires :
« Les objets, je les avais en tête et c’est de là que l’architecture de la maison a été conçue. »
On entre directement dans la maison par le salon à double hauteur. Un escalier aux marches de bois exotique suspendues mène à l’étage sous un puits de lumière qui éclaire toute la pièce et notamment le mur végétal sous l’escalier, une grande natte solaire de Kasserine et un panneau en bois couleur terracotta au niveau de l’étage.
Trois couleurs dominent l’intérieur : le jaune d’or et safran, le vert menthe et malachite et le rouille de la terracotta . Elles se détachent sur le gris des niches, des sols en grès et des panneaux muraux en béton ciré.
Les meubles en bois sont de différentes essences et de provenances diverses, notamment Hink pour les tables, Weart pour les luminaires, Amine Yaïche pour les vanneries. Les assises, (fauteuils et canapés) sont recouvertes des coussins qu’elle a créés avec des patchwork de kilims.
La maison abrite un petit showroom : on y trouve un artisanat décliné, revisité, personnalisé avec quelques pièces choisies. C’est l’univers de la propriétaire. On y découvre des canevas de broderie décorés à sa manière, des coussins grands et petits, des kilims mélangés avec différentes étoffes.
La maison est un lieu d’expérimentation, de juxtapositions d’objets et de styles différents qui se marient et créent une ambiance qui ressemble à son hôtesse. Celle-ci se définit comme une esthète et veut continuer à promouvoir l’artisanat tunisien : « On ne communique pas assez à ce sujet ».
C’était l’objet de « Tunisie autrement ».
Texte : Edia Lesage – Photos © Vincenzo Magnani
Article paru dans iddéco n°39 – Avril 2019