Dedine, comme le surnommaient ses enfants, était une silhouette familière de Sidi Bou Saïd. Edile municipal, enseignant d’arabe, amoureux des arts, peintre amateur, il fréquentait le cercle des artistes du village, partageant avec eux le même amour inconsidéré de la colline sacrée.
Au pied du mont, tout au bout de la route bordant la mer, il ancra sa maison de famille. Aujourd’hui, ses enfants décident de partager cet espace de mémoire, et de l’ouvrir comme maison d’hôte.
Dar Dedine, comme ils ont décidé de l’appeler, est une vigie à la frange du rivage, face à l’emblématique montagne aux deux cornes, ouverte aux vents du large, juste à l’endroit où la forêt rejoint le sable. Là, dans cet hypogée de blancheur sereine, de lumière maitrisée, on peut convier à se poser les dieux, et à s’apaiser les hommes. Tout, absolument tout, a été fait pour que s’oublie la rumeur, se calme la fureur, s’impose la douceur. Douceur des matins calmes, gloire des mitans solaires, somptuosité des couchers de soleil engloutis dans les flots.
Dar Dedine est un poème architectural, mais aussi une remarquable réalisation touristique, répondant aux normes les plus rigoureuses de l’hôtellerie moderne haut de gamme.
La blancheur accueillante de la façade ponctuée de cactées donne le ton. Ici, la sobriété et l’humilité sont de mise face au somptueux paysage qui s’offre dès l’entrée, et avec lequel il serait vain d’espérer rivaliser. La maison s’accroche à la colline, et s’étage sur plusieurs niveaux : un espace à vivre, nacelle suspendue, dessert les différents lieux. Et curieusement, après avoir élaboré de multiples versions architecturales, testé des variantes d’aménagements, Sandra et Nabil Sinaoui sont revenus à la structure initiale de la demeure que Dedine avait, il est vrai, pensée et conçue durant sept ans. Pour meubler la maison, ils ont évoqué leurs souvenirs, retrouvé des meubles anciens ayant vécu en ces lieux, chinés d’autres qui s’intégraient harmonieusement à cette atmosphère, et réussi à créer un harmonieux ensemble, tout de poésie désuète et d’élégante modernité. Dans cette maison mémoire, les portes des chambres reproduisent, en pixels, les photos anciennes de habitants des lieux, et en portent le nom. On égrène, comme une litanie, Beyt Bibi, Beyt Bed, Beyt Helou….
Les cinq chambres, toutes différentes, toutes ouvrant sur la mer, par la fenêtre ou par une terrasse, allient le charme d’une décoration personnalisée au confort des standards internationaux les plus exigeants. Si les meubles sont design, art déco, ou orientalistes, la literie est américaine, le linge de maison vient d’une des plus grandes maisons, créée par un Tunisien…. en Suisse. Les luminaires Art Déco, ont été composés par Sandra Osmani à partir de lanternes de pâte de verre chinées transformées en suspension, mais les machines à Nespresso sont hightech et le mini bar offre du champagne. Le coffre est de serrurerie allemande, le séchoir puissant, et l’écran plasma propose 65 chaines. Un clin d’œil, l’enceinte musicale présente dans toutes les chambres, reproduit une cage d’oiseau qui pourrait être celle de Sidi Bou Saïd. Les tableaux témoignent du panorama de la peinture contemporaine, mais présentent dans chaque chambre, une œuvre de Dedine, peintre amateur d’un certain talent.
Focus sur les salles de bains, pour lesquels Nabil Sinaoui avoue avoir dû retarder son chantier de quelques mois : le somptueux marbre noir adopté pour les revêtements se révéla tellement plus lumineux allié au laiton doré, que l’on changea toutes les robinetteries et les supports de consoles. Quant aux porte-clés, avec de vraies clés et non des cartes électroniques, ils rappellent, par les pierres qui les composent, les couleurs des chambres.
Dans cette maison intimiste et ouverte à la fois, les lieux de convivialité s’articulent autour d’une cheminée, d’une bibliothèque, d’un salon oriental, offrant tous une vue imprenable, sur la mer et sur la forêt. La piscine suspendue, en porte à faux sur la colline, crée une continuité avec l’horizon marin.
Mais la vérité de la maison, comme souvent dans ce village béni des dieux, c’est encore la magnifique terrasse, étagée, éclatante de blancheur, apte à recevoir réceptions et dîners qu’orchestrera Nabil Sinaoui sous son autre casquette de traiteur. « Signature », qu’il dirige de main de maître, a déjà testé la fonctionnalité des lieux, et la fluidité du service, avec pour impératif incontournable la discrétion et le respect du calme et de la sérénité promises aux clients de la maison.
C’est probablement pour toutes ces raisons qu’Alain Ducasse a invité les Sinaoui à inscrire Dar Dedine dans son réseau de boutiques hôtels haut de gamme, répondant aux plus hauts standards de l’hôtellerie : les Collectionneurs.
Texte : Alya HAMZA – Photos © Dar Dedine / Pol Guillard
Article paru dans iddéco n°40 – Juillet 2019