Objet de dévotion selon le dictionnaire, accompagnant et rythmant les prières récitées de manière répétitive, la sebha, ou encore mesbaha, ou tesbih sous d’autres cieux est certes un objet religieux, mais aussi un objet précieux, un bijou quelquefois, une décoration souvent.
On la porte au poignet, l’accroche au rétroviseur de sa voiture, l’enfouit dans son sac, on en fait l’objet recherché d’une collection. Qu’elle compte trente trois ou quatre vingt dix neuf perles, elle accompagne le geste, rassure et assure, occupe les doigts, offre une contenance, et permet à tout instant un retrait salvateur. Qui oserait déranger quelqu’un qui égrène « sabhan Allah » ? Et le glissement régulier des perles ne procure-t-il pas une aura de sérénité enviable ?
Au-delà de la fonction d’objet de culte, ou à cause de celle-ci plutôt, la sebha est aussi un bel objet. Qu’il soit simple et rustique, composé de grains ou de perles de bois, ou précieux et sophistiqué, fait de boules d’ambre ou d’argent, ce chapelet n’est jamais anodin, et le soin mis à le réaliser, particulièrement recherché.
La sebha tunisienne est souvent de bois précieux, santal ou bois de Comores, tourné par des artisans habiles qui savent en respecter les veines et en préserver les senteurs. Elle est également d’ambre gris que l’on a longuement malaxé avec un mélange de musc et de civette, arrosé d’essence de jasmin, et fait sécher à l’ombre durant quarante jours. Elle peut être de perles de nacre, ou de corail, à condition de choisir les coques les plus immaculées et les branches les plus pures. Ou encore d’argent ciselé ou filigrané, niellé ou damasquiné.
Les voyageurs qui reviennent de la Mecque rapportent tous, dans leurs bagages des sebhas à offrir. Celles-ci sont de verroteries multicolores, de pierres semi précieuses, d’os ou d’ivoire. De Turquie viennent des sebhas d’onyx, de quartz, d’agathe, cependant que celles provenant du Pakistan ou de l’Iran, s’habillent de turquoises ou de lapis lazulis.
Simple ou sophistiquée, modeste ou précieuse, cette si belle sebha est d’abord l’objet qui unit et raconte une histoire commune.
Texte : Alya Hamza
Article paru dans iddéco n°20 – Mars 2014
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