A Sidi Bou Saïd où elle vit une partie de l’année, elle termine de restaurer la maison de famille de son époux, Ammar Zribi, enfant du village. Sophie et Ammar se sont rencontrés à Saint Barth, à moins que cela ne soit à Saint Martin, une de ces îles privilégiées, paradis sur terre qu’un groupe de copains tunisiens avaient découverte il y a de cela quelque trente ans, créant autour d’eux une véritable légende. Ammar était de ces précoces aventuriers qui n’hésitèrent pas à quitter les rivages sereins de Sidi Bou Saïd, pour aller voir ailleurs. Aujourd’hui, ils continuent d’y passer une partie de l’année, quand ils ne sont pas à Sidi Bou Saïd ou à New York.

Sophie Matisse à la vente Christie’s des oeuvres de son grand-père Henri Matisse en 2015.
Mais revenons à Matisse, le fabuleux arrière grand-père. La famille vivait dans son souvenir, on emmenait les enfants découvrir cet aïeul qu’ils n’avaient pas connu au musée, on organisait des expositions, recevait des chercheurs, créait une fondation, travaillait sur son œuvre. Pour la petite Sophie née bien après son départ, il était impossible d’échapper à cette aura. Et personne, d’ailleurs ne souhaitait le faire. Mais dans la famille Matisse, Sophie vous parlera volontiers d’un autre personnage flamboyant, Teeny, la grand-mère dont la beauté fut légendaire, l’humour célèbre, et le sens artistique remarquable. Après avoir quitté Pierre Matisse, homme de rigueur et de sérieux, qui créa une fondation en hommage à son père, elle épousa… Marcel Duchamp, un ancien amour, et un artiste de belle fantaisie. Très proche de cette grand-mère pas comme les autres, Sophie vécut dans ce milieu artistique inspirant.

Tableau « Blue Dress » de la collection « Zebra Stripes »
« Enfant, j’ai eu des problèmes de dyslexie. Mais depuis toute petite, je dessinais. Les lignes, les formes, les couleurs ont toujours été pour moi le moyen d’expression le plus naturel ». Bien sûr, elle a continué. Quand elle a entamé ces séries qui ont fait son succès, reprenant des tableaux célèbres de l’histoire de l’art en occultant des personnages, c’est évidemment par des œuvres de Matisse qu’elle a commencé. Cette démarche iconoclaste a fait connaître Sophie Matisse : « En effaçant les personnages de tableaux emblématiques, et en me mettant à leur place, j’offre à chacun la possibilité d’y entrer. La série intitulée « je reviens dans cinq minutes » a été exposée à New York ».

Guernica, 2003
Du dessin, des formes, des couleurs, Sophie Matisse passe à la lumière et à l’image. Et réalise des films. L’exposition qu’elle prépare pour l’année prochaine présentera tableaux et films.
Sur sa terrasse de Sidi Bou Saïd, elle travaille un peu, mais souhaite faire des choses différentes « Peut-être des dessins sur tissu, ou sur porcelaine. Ici, cela me semble plus aisé à réaliser ». Il est vrai que l’environnement est inspirant et que le village a une belle tradition en la matière.
Texte : Alya Hamza – Photographie © Sophie Matisse
Article paru dans iddéco n°38 – janvier 2019
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